Toutes ces filles couronnées de langues
L’île de Kyrra était située à l’Est des côtes grecques, ou plutôt à l’Ouest des côtes turques, en réalité l’île de Kyrra refusait de se situer. Les quatre-vingt-neuf femmes qui l’habitaient entreprirent d’abord d’inventer une langue nouvelle, première pierre d’une société nouvelle. Pendant quatre-vingt-neuf jours elles trouvèrent et recensèrent des gestes puis les formes que ces gestes dessinaient. Elles les inscrivirent au fur et à mesure sur le sol, les murs, les pierres, les chèvres, les ventres et l’île devint un alphabet.
Elles entreprirent le tissage d’un premier récit. Gestes et formes produisaient des signes. Assemblés, les signes formaient des mots. On décida de règles simples. Puisque le mot est avant la chose il peut créer la chose tant qu’aucune chose ne se présente pour lui correspondre. Le mot ne peut être dit. Les signes ne sont pas des sons, ils ne sont que des gestes et des formes. La langue nouvelle ne sera pas parlée, ne donnera lieu à aucune parole. Elle sera écrite et gestuelle. Uniquement. La voix sera réservée au chant, au cri, à la musique, aux émotions simples, au rythme et à la mélodie, à la dissonance. On fabriqua des instruments pour accompagner la voix. De toutes sortes.
Projet réalisé en collaboration avec Amélie Giacomini
France, 25 min, fiction
Avec Nathalie Broizat, Silvia Di Rienzo, Anna Gaïotti, Pauline Lorillard et Susanne Schmidt
Chorégraphie: Anna Gaïotti
Image: Thomas Favel et Michele Gurrieri
Son: Nicolas Becker et Raphaële Dupire
Montage: Laurent Leveneur et Hodei Berasategui
Production: Corinne Castel, Les volcans
Le titre est emprunté à Hélène Cixous et à son Rire de la Méduse.
Le projet est soutenu par Lafayette Anticipations, le CIRVA, le GMEM, la Fondation Villa Datris et Danièle Kapel-Marcovici.
Les postures chorégraphiques des femmes/filles que vous filmez se tiennent là : «quelque chose s’est passé» et ces corps tachés de noir, riant, chantant en sont le secret… tu mais couronné de langues.